Le jeu, comme d'autres formes d'art, est le reflet de la culture dans laquelle il a vu le jour.
L'Homme joue depuis des millénaires et en a laissé des traces.
On peut s’appuyer sur différentes sources pour étudier l’origine des jeux : objets, représentations, références littéraires.
Le nombre de travaux sur le jeu est faible, mais on retrouve des ouvrages fondateurs :
1283 : Alphonse X (photo du patrimoine ludique de l’époque)
1689 : Thomas Hyde, Orient Tabilus (jeux orientaux)
1873 : Becq de Fouquière, Les jeux des anciens
Auteurs de référence : Murray & Bell
Voici quelques pistes vous donnant un bref aperçu de l'origine des jeux de société d'aujourd'hui.
Le jeu structuré apparait autour de -8000 av. J-C, ce qui correspond à la sédentarisation.
Au départ, ce sont essentiellement des jeux de divination, d’oracle, très proches de la prière.
Les dés furent alors utilisés pour ces lancers d’oracle, pour lire l’avenir.
Les 1ers dés de l’humanité sont à 2 faces (coquillages, baguettes, tétraèdres). On est sur un système binaire
On trouve ensuite d’autres types de dés, comme l’osselet (4 faces), qui a été l’un des plus utilisés, et notamment pour les oracles.
Présent à l’état naturel, il a été fabriqué en divers matériaux. Beaucoup de dés étaient à 4 faces.
Le dé cubique (-3000), était au départ utilisé de façon autonome.
Et puis on retrouve des dés à 12 et 20 faces.
Sur les 1ers jeux de jeu, le pion représente le voyage de l’âme, et les objets que l’on lance vont permettre le déplacement de ce pion.
Il y a toujours ce lien avec le divin, ce qui explique encore une grande part de hasard dans les mécaniques. On distingue alors 3 types de jeux :
La course : Le but est d’aller d’un point A vers un point B
- Mésopotamie : 20 cases (-2600), Royal d’Ur (-2000)
- Egypte : Senet (-2600), 58 trous (-2200), Mehen (-3000)
- Inde : Pachisi (VIème), Chaupar (VIème)
- Sho, Yut, ZohnAhl
Le combat sur parcours : Le but est d’exterminer l’autre
- Moyen-Orient : Nard (Vème - VIème). On commence à tuer les pions, mais ça n’a pas de succès en Europe, sauf en Scandinavie.
- Sahkku, Daldosa, Chasse aux filles (origine médiévale)
Le jeu sur table
- Ludus Duodecim Scriptorium (1er siècle). C’est l’origine des jeux sur table.
On retrouve énormément de tricherie dans les jeux de hasard, à cause de l’appât du gain.
Dès la Rome ancienne, on avait des dispositifs qui permettaient d’éviter la manipulation des dés.
De plus, il y a de la violence autour de ces jeux, du coup, le pouvoir l’interdit. De cette interdiction, on passe au contrôle, et on le taxe.
Les Hommes ont fini par abandonner le hasard et l’influence divine, afin de laisser place au libre arbitre, à l’esprit humain :
- Les mancalas (Vème)
- La Pettie (Vème av. JC), jeu de capture (Grèce)
- Weiqi (Vème av. JC), appelé aussi le Go (Chine)
- Alquerque, certainement une transformation de la Pettie
- Chaturanga (Vème), ancêtre des échecs (Inde)
Le mancala désigne l’objet, le type de jeu est dit de semaille. Ces jeux sont souvent en bois avec des alvéoles.
Ces jeux proposent des territoires séparés avec des pions communs, où l'on va semer les pions dans les alvéoles.
Ces jeux ont été très présents en Afrique, en Inde, en Chine (sud), en Indonésie, puis plus tard, au Brésil et en Amérique du Nord.
Les mancalas sont encore très imprégnés de sacré, leur utilisation est assez ritualisée.
On ne sait pas si le mancala est africain ou mésopotamien.
L’Awalé a été le plus diffusé, car il est encore vendu partout dans le monde.
-Afrique : Awalé / Wari / Oware (2 rangées), Chisolo (4 rangées), Gabata (3 rangées).
-Asie : Pallankulli (Inde), Dakon / Gongklak (Indonésie).
Au Vème, on jouait au Chaturanga sur un plateau d’Ashtapada. On est sur un jeu de hasard, puisqu’on lance des dés.
Comme en plus on joue de l’argent, ce jeu a été interdit. On se met alors à y jouer sans les dés.
Certains émettent l’hypothèse que ce jeu serait arrivé par les routes commerciales en Inde, sous le nom de Shatrang.
Le principe du jeu à 4 joueurs les embête, on récupère donc 2 armées chacun à 2 joueurs, ce qui expliquerait les pièces en double.
Comme il ne peut pas y avoir 2 rois, le 2nd devient un vizir.
Le Shatrang va arriver en Europe avec les invasions Maures (VIIème – VIIIème), et ressemble assez aux échecs actuels, mis à part certains déplacements de pièces.
Au 16ème, la vierge (vizir), devient la dame et prend un pouvoir énorme. Ça va en faire un phénomène de société qui va faire disparaitre un certain nombre d’autres jeux.
Toutes les règles actuelles se mettent alors en place.
C’est le jeu qui a connu le plus de variantes : Xiangqi (Chine), Shogi (Japon), Janggi (Corée), Makruk (Thaïlande).
Alquerque
Il est à l’origine des jeux de saut. Ce jeu suit les invasions arabes, et va parcourir le monde. En découle notamment le Fanorona qui est un double Alquerque.
On trouve aussi le Yoté en Afrique, le Dabcot Prejjesne en Scandinavie avec des nouveautés et des exclusivités.
Le jeu de Dames apparait en Europe sous sa forme actuelle au 18ème.
Pettie
Il va directement influencer Rome, et notamment donner le jeu de Latroncules, joué sur toutes les frontières de l’Europe.
Il ne va pas avoir un gros succès, mais va influencer les Tafl, notamment le Huefatafl.
Les échecs vont chasser tous les jeux de Tafl dès leur naissance, dans toute l’Europe du Nord. Le seul qui va survivre est le Seega.
Jeux d’alignement
Assez anciens aussi. Les jeux de Marelle étaient joués dans la Rome ancienne.
Halma
Créé à la fin du 18ème, il va donner naissance aux Dames chinoises, aux Chats de Kikenny, au Conspirateur. Ces jeux viennent tous d’Europe.
Les originaux
- Ko Na Ne (ou dames hawaïennes), solitaire à 2 où on perd quand on ne peut plus jouer
- Surakarta et Pasang (jeux des îles)
- Ringo (germanique), c’est le seul jeu qui combine la prise par saut et par encadrement
- Mu Torere (Mahori → Nouvelle Zélande)
- Nei Pat Kono
Ce sont les 1ers jeux où une partie des données nous est dissimulée.
Ils apparaissent au XIème en Chine, et à la fin du Moyen-âge en Europe (XIVème) par influence persanne.
1 siècle plus tard, il y avait des marchands de cartes partout en Europe. La carte française s’est mondialisée, car elle était simple et peu coûteuse.
L’Inde et le Japon furent plus tard influencés et se sont aussi mis aux cartes.
Enfin, il y a quelques décennies, des auteurs mettent au monde des jeux influençant directement la forme actuelle des jeux de société.
L’école anglo-saxonne privilégie le thème, l’attaque directe et les lancer de dés (hasard). L’école allemande privilégie les mécanismes, l’attaque indirecte et la réflexion (contrôle).
1903 : Elizabeth J. Magie, Propriétaire (ancêtre du Monopoly)
1913 : Charles Darrow, Monopoly (édité chez Parker)
1946 : Anthony Pratt, Clue (Cluedo)
1948 : Alfred Butts (USA), Scrabble (apparaît en 1955 en France)
1957 : Albert Lamorisse, La Conquête du Monde (ancêtre de Risk)
1959 : Allan B. Calhamer, Diplomacy (réédité 25 fois)
1960 : Edmond Dujardin, 1000 bornes (1er jeu de cartes d’action)
1974 : Gary Gigax, Donjons & Dragons (1er jeu de rôles)
1977 : Bill Eberle, Jack Kittredge, Peter Olokta & Bill Norton, Rencontre Cosmique
1981 : Francis G. Tresham, Civilisation
1984 : Scott Abbott & Chris Haney, Trivial Pursuit
1985 : Bruno Faidutti, Baston
1988 : Gérard Mathieu, Gérard Delfanti & Pascal Trigaux, Full Metal Planete (Ludodélire → Descartes → Asmodée)
1993 : James Wallis, Andrew Rilstone & Richard Lambert, Once Upon A Time (Il était une fois)
1993 : Richard Garfield, Magic The Gathering
1995 : Klaus Teuber, Les Colons de Catane
1999 : Bruno Faidutti, Citadelles
2000 : Jurgen Wrede, Carcassonne (édité chez Hans im Glück)
2000 : Reiner Knizia, Lord of the Rings
2001 : Hervé Marly & Philippe des Pallière, Les loup-garous de Thiercelieux
2002 : Andreas Seyfarth, Puerto Rico (Top liste des jeux préférés de Tric Trac)
2004 : Alan R. Moon, Les Aventuriers du Rail